La liberté du freelance, c’est aussi celle de pouvoir toucher à tout… voire d’exercer plusieurs métiers. C’est pourquoi un certain nombre d’indépendants sont aussi des slasheurs : multi-casquettes, ils jonglent avec plusieurs activités pour créer la carrière qui leur ressemble.
Le monde du travail évolue, propice à l’émergence de nouvelles pratiques. Depuis quelques années, une nouvelle génération de travailleurs fait parler d’elle : les slasheurs. Par passion ou par nécessité – parfois un peu des deux – ces derniers brisent les codes de la traditionnelle carrière, en cumulant plusieurs métiers.
« Les slasheurs ont souvent été déçus par les formes de salariat traditionnelles »
Généralement bien formés (bac + 4 ou 5), les slasheurs ont souvent été déçus par les formes de salariat traditionnelles. Confrontés à des entreprises qui embauchent des stagiaires à tour de bras mais aucun CDI, qui font passer les résultats avant le bien-être de leurs équipes, les jeunes générations préfèrent inventer leurs propres modèles. En quête de liberté et d’épanouissement individuel, ils n’hésitent pas à multiplier les casquettes, tant qu’ils exercent un travail qui leur plaît.
C’est le cas de Sarah, journaliste/réalisatrice/enseignante/écrivain. « Après 15 ans dans la même boîte, j’ai envie de vivre plein d’aventures », confie-t-elle. « J’ai donc écrit un livre, et me suis lancée dans la réalisation de documentaires. Quelque chose dont je rêvais depuis des années. Je suis aussi devenue prof de journalisme à la Sorbonne, un peu par hasard. J’ai répondu à une annonce et j’ai été prise, sans avoir le temps d’y réfléchir. Aujourd’hui, je m’apprête à lancer un site sur la fin de vie et la mort, et je crée une boîte de brand content avec un ami. Ma seule difficulté : le manque de temps. Et le fait que, parfois, je me sente tiraillée… Je devrai sûrement faire certains choix. Mais une chose est sûre : je garderai plusieurs casquettes. C’est tellement galvanisant ! »
« Ils préfèrent cumuler plusieurs jobs de manière à pouvoir consacrer du temps à leur passion […] parfois jusqu’à pouvoir en vivre »
Certains, moins nombreux, se font slasheurs car leur salaire n’est pas suffisant pour joindre les deux bouts. Quant à d’autres, ils préfèrent cumuler plusieurs jobs de manière à pouvoir consacrer du temps à leur passion – la musique ou l’écriture par exemple. Parfois jusqu’à pouvoir en vivre. Une façon de retarder le moment de faire un choix, voire de ne pas choisir du tout. Fruits d’une société de l’instantanéité, les slasheurs ne supportent pas de s’ennuyer. Au quotidien, ils sont habitués à faire plusieurs choses en même temps, en témoignent leur ordinateur ou smartphone, où les fenêtres et applis se superposent. Ils ont d’ailleurs appris à s’adapter face aux évolutions technologiques, et ainsi à se former en permanence à la maîtrise de ces nouveaux outils.
Céline, chanteuse intermittente du spectacle et thérapeute auto-entrepreneure, se définit comme une « boîte de Pandore disponible ». « En tant qu’accompagnante, je pioche ce qui me semble bon pour la personne, m’inspire de plusieurs méthodes et me les approprie. Le monde est en pleine transformation, tout évolue rapidement, et nous devons nous adapter ! Le fait d’être chanteuse en parallèle de mes activités de thérapeute me permet de nourrir la femme en moi et de me réaliser, afin d’être disponible pour les autres ensuite. Exprimer ma créativité est une forme de ressourcement. »
« Avoir plusieurs activités, ça peut déstabiliser »
Si le fait d’avoir plusieurs cordes à son arc contribue à son épanouissement, elle met cependant en garde quant à l’image que cela peut renvoyer. « Avoir plusieurs activités, ça peut déstabiliser. Le monde aime bien mettre dans des cases, sinon ça ne fait pas sérieux… Avoir plusieurs casquettes demande donc d’être clair avec chaque partie de soi-même, de posséder un esprit pratique et une bonne dose de confiance en soi. Avoir un site web précis et bien détaillé est un plus ».
Heureusement, ces multiples compétences peuvent aussi être un atout dans le monde professionnel – à condition de savoir les vendre ! Jean-Baptiste, acheteur/blogueur, a créé le site Étudions à l’étranger alors qu’il était encore étudiant. « Avec sa montée en visibilité et l’arrivée des annonceurs, je me suis mis sous le statut d’autoentrepreneur dès janvier 2013 ». Menant ainsi de front cette activité, ses études et plusieurs stages, notamment chez Airbus. « Le recruteur n’a pas hésité à me dire que c’est grâce au projet Étudions à l’étranger que j’avais été embauché », souligne-t-il. À la fin de ses études, il a d’ailleurs été embauché par le groupe, sans que son activité d’autoentrepreneur ne pose problème.
« Être slasheur permet de multiplier les rencontres et donc, les contacts pro »
Pour les freelances, être slasheur permet notamment de multiplier les rencontres et donc, les contacts professionnels : un atout pour vendre ses services et se faire recommander. Un point que met justement en évidence Jean-Baptiste : « je retire beaucoup de positif de mon expérience de slasheur, à la fois en termes de rencontres, d’expériences et de développement personnel ». Pour bien vous vendre, n’hésitez pas à mettre en avant vos capacités d’adaptation, d’apprentissage rapide et d’organisation, qui découlent d’une telle expérience. Seul point noir pour le blogueur : l’administration française. « Entre l’URSAFF, le RSI, la CFE… elle est difficilement accessible pour régler les problèmes que peuvent poser une double-activité ».