Parmi les nombreuses obligations des auto-entrepreneurs, celles relatives à l’obligation d’ouvrir un compte bancaire dit “ professionnel ” a soulevé des doutes et des interrogations.

En effet, depuis 2015, diverses réformes se sont succédé concernant les obligations relatives à la gestion de l’activité de l’auto-entrepreneur, jusqu’à la loi PACTE en 2019. Les banques ont aussi généré la confusion en proposant voir en imposant parfois, l’ouverture d’un compte professionnel à leur client.

La réalité est pourtant simple. Les auto-entrepreneurs doivent en effet ouvrir un compte dédié à leur activité mais qui n’est pas nécessairement “ professionnel ”.

 La loi autorise par ailleurs certains délais pour que les auto-entrepreneurs puissent se mettre à jour de leurs obligations. Retour sur les caractéristiques du compte bancaire de l’auto-entrepreneur, ses droits et ses obligations.

Un compte dédié à l’activité de l’auto-entrepreneur : une obligation ?

Pour comprendre les confusions au sujet du compte bancaire de l’auto-entrepreneur, il faut remonter à 2015. En effet, le 1er janvier 2015 marquait l’obligation pour les auto-entrepreneurs de détenir un compte bancaire dédié à leur activité. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 (Loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014) prévoyait que :

Le travailleur indépendant qui a opté pour l’application de l’article L. 133-6-8 du présent code est tenu de dédier un compte ouvert dans un des établissements mentionnés à l’article L. 123-24 du code de commerce à l’exercice de l’ensemble des transactions financières liées à son activité professionnelle.” (article L133-6-8-4  Code de la sécurité sociale dans sa version de 2015). 

Une obligation atténuée par la loi PACTE

 A compter de 2019, la loi PACTE (loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises) destinée à faire grandir les entreprises françaises, a modifié les dispositions relatives à l’obligation de l’auto-entrepreneur d’ouvrir un compte bancaire dédié à son activité. 

Ainsi, la loi PACTE conditionne cette obligation en la limitant aux micro-entrepreneurs dont le chiffre d’affaires annuel excède 10 000 euros et ce durant deux années consécutives. 

“ Les travailleurs indépendants mentionnés à l’article L. 613-7 sont tenus de dédier un compte ouvert dans un des établissements mentionnés à l’article L. 123-24 du code de commerce à l’exercice de l’ensemble des transactions financières liées à leur activité professionnelle lorsque leur chiffre d’affaires a dépassé pendant deux années civiles consécutives un montant annuel de 10 000 €. “ (article 39 loi PACTE et article L. 613-10 du code de la sécurité sociale).

 En résumé, l’obligation d’un compte bancaire dédié à l’auto-entrepreneur s’applique si les critères suivants sont remplis : 

  • la personne physique a le statut de micro-entrepreneur ;
  • elle dépasse un chiffre d’affaires de 10 000 euros ;
  • pendant 2 années consécutives .

Quelle est l’utilité d’un compte bancaire dédié à l’activité de l’auto – entrepreneur ?

L’ambition affichée de la loi était avant tout d’éviter la confusion entre patrimoine privé et patrimoine professionnel et renforcer les contrôles afin de diminuer les fraudes.

Du côté de l’auto-entrepreneur, le compte dédié à son activité lui permet d’y localiser l’encaissement de ses recettes, les prélèvements en lien avec son activité, les prélèvements liés à sa rémunération etc.

Les avantages de l’ouverture d’un compte dédié : l’impact sur les obligations comptables de l’auto-entrepreneur

 Même si l’auto-entrepreneur n’atteint pas le seuil du chiffre d’affaires le contraignant à ouvrir un compte bancaire, l’utilisation d’un compte dédié à son activité peut être une vraie valeur ajoutée au regard des obligations comptables qui lui sont imposées par la loi. 

  Rappelons en effet que le micro-entrepreneur doit tenir un livre de l’ensemble de ses recettes encaissées. Ce document est demandé en cas de contrôle de la micro-entreprise, c’est pourquoi le livre des recettes doit clairement mentionner :  

  • Le montant des recettes
  • La provenance des recettes
  • Les modes de règlement (chèque, espèces ou autres)
  • Les factures (référencées).   

 Pour les activités de vente de marchandises, fournitures, prestations d’hébergement, un registre d’achats est obligatoire. Ce dernier doit préciser les mêmes éléments que le livre des recettes (articles R123-172 à R123-177 Code de commerce).   

L’existence d’un compte dédié à l’activité du micro-entrepreneur facilite ainsi  la mise en place des obligations comptables grâce à la visibilité des opérations financières.

 Compte bancaire “ dédié ” versus compte bancaire “ professionnel ”

 Le compte bancaire dédié à l’activité de l’auto-entrepreneur n’est pas un compte professionnel. La confusion provient parfois des banques qui incitent les auto-entrepreneurs à opter pour un compte spécifique à leur activité. Généralement, le produit bancaire proposé (le compte bancaire professionnel) s’accompagne de services spécifiques et avantageux pour le client. 

  En réalité, d’un point de vue juridique, le compte dit “ professionnel “ n’est une obligation que pour les sociétés détenant un capital social (SARL, SAS, EURL, SA…) dont le compte bancaire professionnel permet de déposer le capital de la société lors de la création.  

La création d’une micro-entreprise ne nécessite pas l’ouverture d’un compte bancaire professionnel puisque ses formalités juridiques sont allégées. Un compte courant au nom de l’auto-entrepreneur, destiné uniquement à la gestion financière de l’activité professionnelle est suffisant. 

 Bien que l’obligation du compte bancaire dédié à l’activité ne soit pas immédiate, elle apporte une visibilité certaine à l’activité. La gestion administrative et comptable s’en trouve facilitée car il est vrai que la séparation du patrimoine privé du patrimoine professionnel permet un suivi optimal de l’activité.

 Textes de référence : 

  • Loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 financement de la sécurité sociale pour 2015
  • loi PACTE n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises
  • article 39 de la loi PACTE
  • article L. 613-10 Code de la sécurité sociale
  • articles R123-172 à R123-177 Code de commerce